Rêverie vespérale
Manon marche sur le sentier
Où tous les rêves se libèrent.
Et c’est l’amour et l’amitié
Qui lui racontent leurs mystères…
Elle voit les habits désuets
Et blanches coiffes des comtesses
S’adonnant à l’art du menuet,
Quand l’horloge des ans régresse
Au bout du jour faible qui meurt.
Manon savoure son errance,
Et s’entend alors la rumeur
Du vent lui insufflant l’absence…
Un bel après-midi d’été
Du lointain dix-huitième siècle,
Une comtesse boit un thé.
On lui parle de Sainte Thècle.
Elle n’écoute pas la Sœur
Du couvent où elle est novice,
Car elle songe à ce bonheur
Dont elle dut fuir les délices.
Pourra-t-elle dire ces vœux
Contre la gaieté de son âme,
Et contre cet amour heureux
Auprès du corps qui la réclame ?
Mais son père ne l’aimant pas
Cet homme qu’il nommait « bellâtre »,
Elle devra jusqu’au trépas
Passer son existence au cloître…
Manon retourne à sa maison.
S’en va le rêve avec sa fresque :
La noble perdant la raison
Pour une passion gigantesque.
Et puis, à l’instant du coucher,
Vient le quart d’heure de lecture :
« Un jeune couple endimanché
Connaîtra la mésaventure… ».